Si Capitalisme se décidait (enfin) à consulter un Hypno-Psychothérapeute, il en aurait (enfin!) pour son argent.
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"Le Chat", de Philippe Geluck |
En ce grand jour, il pourrait pour la toute première fois souffler et se détendre, lui qui n'était jusqu'à présent que contractions, chocs, soubresauts et amputations. Ce corps blessé et à bout de souffle présente, sans en avoir conscience, tous les signes du burn-out. Il pourrait s'autoriser à prendre une belle et profonde inspiration (lui qui la cherchait à l'extérieur sans savoir qu'il en avait toutes les capacités à l'intérieur). Lui qui ne pensait pouvoir vivre et survivre que par une perpétuelle expansion, découvrirait l'univers illimité de son intérieur.
Le recadrage de celles qu'il prenait jusqu'à présent pour de dogmatiques vérités ne fait que commencer.
Tenez, une dans l'air du temps: il faut travailler plus pour gagner plus. Le corps humain n'étant pas une machine, à quoi lui sert-il d'avoir gagné plus quand le corps est trop fatigué pour en profiter? Et se féliciter à cet instant d'avoir gagné suffisamment d'argent pour payer les soins médicaux censés réparer le corps usé relève du syndrome de Stockholm.
Et puis cette autre, Économie de marché et Démocratie sont indissociables. Voyons d'abord leurs définitions.
L'économie de marché qualifie un système dans lequel les échanges de biens et services sont régis par le jeu de l'offre et de la demande qui détermine les prix sur les marchés. L'initiative privée, la propriété privée et le profit y sont considérées positivement.
Démocratie: Etymologie : du grec dêmos, peuple, et kratos, pouvoir, autorité. La démocratie est le régime politique dans lequel le pouvoir est détenu ou contrôlé par le peuple (principe de souveraineté), sans qu'il y ait de distinctions dues à la naissance, la richesse, la compétence... (principe d'égalité).
Alors alors... serions nous face à un être schizophrène? Qui d'un côté récompense ceux qui font le plus de profits en "étant indissociable" d'un "pouvoir détenu ou contrôlé par le peuple, sans qu'il y ait de distinctions dues à la naissance, la richesse, la compétence"? Mhhmm, ce cas devient de plus en plus intéressant. Dans sa tête, en même temps qu'il perçoit la longueur du processus qui vient de s'amorcer, le psy voit en flash le sourire de ses enfants quand il leur annoncera qu'il peut enfin envisager de faire poser la piscine. Oui le psy vit dans un système capitaliste, où le malheur des uns fait le bonheur des autres, dans un cercle si vicieusement encastré que chacun se réjouit de l'échec de son voisin, tremplin et podium du sien.
La piste de la schizophrénie
La schizophrénie est une maladie psychique grave, qui s'accompagne d'une perte du contact avec la réalité, de délires ainsi que de modifications de la pensée, du langage et du comportement. Les patients sont souvent incapables de faire la distinction entre la réalité et leur propre perception des évènements.
Le schizophrène ne construit pas son monde en relation avec les autres. Sa pensée se replie sur elle-même et se nourrit des complexes inconscients, au lieu de se nourrir des échanges relationnels.
L'école française de psychiatrie ajoute à cette définition la notion d'évolution chronique, et de trouble profond de l'affectivité. Les troubles de l'affectivité sont de l'ordre de l'indifférence, de l'apathie, des sentiments paradoxaux, et ils finissent par entraîner un affaiblissement de l'intelligence. L'aboutissement d'une évolution schizophrénique s'apparente à la démence. Ainsi se distinguent la paranoïa, la bouffée délirante, la psychose hallucinatoire chronique, que les anglo-saxons englobent indistinctement dans les troubles de la personnalité.
Troubles de l'affectivité de l'ordre de l'indifférence? Quand on voit les plans de restructuration et autres économies d'échelle supprimant des centaines ou milliers de postes, c'est à dire privant autant de familles de la sécurité primaire et basique du quotidien, je crois que nous pouvons valider cette case.
Bouffées délirantes? La course sans fin à la production-consommation-obsolescence, nous hissant chaque jour sur un tas de déchets de plus en plus hauts, tels des coqs sur un tas de fumier, pourrait entrer dans cette catégorie. A moins que? Et si c'était une géniale stratégie de Capitalisme pour nourrir son complexe inconscient et réaliser son projet ultime: l'expansion du volume de la planète par les déchets? Stratégie audacieuse, il faut le reconnaître! Une fois la surface "naturelle" de la Terre ensevelie sous les immondices, il faudra à Capitalisme inventer un mode de production basé sur le recyclage des déchets, tout en fixant à sa créativité la nécessité de continuer à progresser. Recycler plus pour s'étendre plus...
Hop hop hop on s'égare! Aussi fascinant que puisse sembler l'abîme de cette pensée pathologique, ne nous y perdons pas! Un autre trouble mériterait d'être exploré, celui de la paranoïa.
La personnalité paranoïaque se caractérise par plusieurs éléments. L'hypertrophie du Moi en est le signe principal. Le sujet est autoritaire, sûr de lui, susceptible, orgueilleux ; il sait toujours tout et a toujours raison. Il refuse toute critique.
La psychorigidité s'exprime par une obstination, un mépris des autres et une intolérance qui peut aller jusqu'au fanatisme.
La méfiance est constante et le paranoïaque interprète toujours de façon malveillante les attitudes des autres. La fausseté de son jugement va de pair avec une intelligence normale. La pensée logique est perturbée par la méfiance, l'orgueil et la subjectivité.
Froideur, manque de sens de l'humour, hostilité, ambition, rigidité, mépris des faibles sont patents.
L'inadaptation sociale est une conséquence logique de ces traits de caractère.
La plupart des paranoïaques ne deviennent jamais délirants et les individus traversent leurs difficultés relationnelles et sociales sans aller consulter le médecin, en se contentant de tyranniser leur entourage familial et professionnel.
Heu... ça me fait penser à d'autres personnes, mais ça n'est pas le sujet du jour.
Capitalisme, un paranoïaque qui s'ignore?
Selon le film documentaire "Les nouveaux chiens de garde"*, l'insécurité serait l'un des principaux instruments de contrôle du Grand Capital. Au nom de l'insécurité dans une zone de l'Orient plus ou moins proche, un pays (autoproclamé "garant de la Démocratie") finance et arme un groupuscule islamique pour "rétablir l'équilibre" de la dite zone (voir les révélations de WikiLeaks alourdissant le dossier de Hillary Clinton, onglet "création de Daesh/EI"). Et toujours au nom de cette même insécurité, son créateur déploie forces et moyens colossaux (au mépris des droits humains les plus fondamentaux, à commencer par cette Démocratie dont il dit être le pilier) pour détruire ce qu'il a enfanté.
"Mépris patent des faibles", difficile de faire un choix dans l'abondance d'exemples l'illustrant. Allez au hasard, celui de la "vermine" (vous savez, ceux qu'on appelle aussi les "sans dents") dont le "nettoyage" nécessite un autre produit du Capitalisme, le Kärcher...
Personnalité Schizoïde + Paranoïaque, ça commence à faire beaucoup pour un seul homme... Le psy soupçonne une liste autrement plus longue, mais pour l'hypno-psychothérapeute, la guérison ne consiste pas à poser des étiquettes.
Pour chacun de ses clients, les étapes de l'accompagnement incluent une prise de conscience du sujet, une information précise sur ce trouble, et un changement progressif du comportement de la personne. A lui donc d'informer ce client de son état, suffisamment précisément pour amener à une prise de conscience. Capitalisme est triste, il souffre. Il a cru bien faire pour protéger et faire grandir en santé et sécurité sa grande famille de l'humanité, et aujourd'hui se retrouve profondément seul. Vilipendé, honni, il voulait le meilleur pour ses enfants qui aujourd'hui défilent dans la rue en brandissant des pancartes insultantes. Il a pourtant suivi à la lettre les recommandations de ses Pères (dont son tuteur préféré, Milton Friedman adoré). Qu'est ce qui a merdé? Toute une vie pour en arriver là, se sentir vieillir et partir sans rien laisser, et savoir qu'au mieux, jusqu'à son nom sera complètement oublié. Partir sans laisser d'héritage, si ce n'est de lourdes dettes, qui mettront des générations à être épongées. Partir en sachant que ces enfants qu'il aura modelé à son image devront amputer, soigner, sublimer son empreinte pour ne serait-ce que pouvoir exister. Rien que d'y penser, le souffle doit lui manquer et son cœur fatigué, tressauter.
La séance se termine. Capitalisme règle consciencieusement les honoraires et note son prochain rendez vous. En lui, une étincelle d'espoir. Et si un autre système était possible? Et si prospérer pouvait être synonyme de respect de l'unicité? Lui qui s'était tant de fois trouvé des excuses pour mépriser les psy et compagnie, a maintenant hâte de son prochain rendez-vous. À suivre donc!
*"Les Nouveaux Chiens de Garde", réalisé par Gilles Balbastre et Yannick Kergoat, tiré de l'essai de Serge Halimi. Disponible sur: https://www.youtube.com/watch?v=NO8EEjI85Fc
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